vendredi 30 octobre 2015

Night film

La jeune Ashley Cordova est retrouvée morte dans un entrepôt abandonné. Tous les éléments tendent à confirmer son suicide. Pourtant, le journaliste d’investigation Scott McGrath reprend l’enquête car d’étranges circonstances entourent le décès de la fille du légendaire réalisateur de films d’horreur Stanislas Cordova. Cet homme auquel de nombreux fans vouent un véritable culte ne s’est pas montré depuis plus de 30 ans. Il est également responsable de la destruction de la carrière de McGrath qui s’était un peu trop intéressé à lui. Entre vengeance et fascination, McGrath n’en a pas fini avec le cas Cordova.
Cet excellent thriller vous emporte dans une enquête passionnante et plonge dans les profondeurs de l’âme humaine. Nourrit de documents créés de toute pièce et qui donne corps à cet homme exceptionnel qu’est Cordova, le roman s’inscrit dans une grande tradition cinématographique. De nombreux réalisateurs viennent à l’esprit pendant la lecture du roman ainsi que certains romans. L’écriture, très visuelle, ainsi que les documents qui nourrissent le roman, rendent vivant voire cinématographique cet époustouflant roman dont il me faut taire l’intrigue pour lui en laisser toute la saveur.
Intérieur nuit, Marisha Pessl, Gallimard, 2015

dimanche 18 octobre 2015

The Ballade of Gallant Ash

Constance part à la guerre et laisse derrière elle, son mari, Bartholomew. Travesti en homme, elle s’engage chez les Confédérés sous le nom d’Ash Thompson pour défendre son pays et ses convictions. Après avoir fait ses classes, elle découvre les champs de bataille et les horreurs de la guerre en s’accrochant à l’idée qu’elle retrouvera un jour son mari et sa ferme.
Oscillant entre rêve et cauchemar, nous suivons le destin hors du commun de Constance qui nous raconte son incroyable aventure sans fard. Ce livre retrace la Guerre de Sécession vue par un simple soldat et évoque la difficulté de revenir à la vie après avoir connu l’horreur des combats. 
Neverhome est avant tout un roman d’atmosphère où l’horreur et la folie ne sont jamais bien loin. Les aventures de Gallant Ash ne suffisent pas à atténuer cette chape de plomb. Le roman m’a laissé un goût amer dans la bouche. A ne lire que si l’on est en forme.
Neverhome, Laird Hunt, Actes Sud, 2015

lundi 5 octobre 2015

1992 : émeutes à Los Angeles

Le 29 avril 1992, les quatre policiers ayant battu à mort Rodney King sont acquittés. A la suite de cette nouvelle, des émeutes vont éclater à Los Angeles et durer 6 jours mettant la ville à feu et à sang. Dans le quartier de Lynwood, dominé par le gang latino de Big Fate, Ernesto Vera est battu à mort parce qu’il a le malheur d’être le frère d’un des membres de ce gang. Sa mort est le point de départ de toute une série d’événements qui s’inscrit dans le chaos ambiant.
Roman choral, chaque protagoniste prend en charge le récit. Ils évoquent leur histoire, leurs motivations profondes, leurs amours. Membres de gang, graffeur, pompier, infirmière, tous nous parlent d’un Los Angeles bien éloigné du rêve américain où la guérilla urbaine est la norme non l’exception.
J’ai été autant happé par ce milieu des Chicanos avec ses codes et ses valeurs que lorsque j’ai découvert la série Sur écoute qui parle des gangs de la drogue dans les quartiers ouest de Baltimore. D’ailleurs, Ryan Gattis, comme les scénaristes de la série, s’attache à nous présenter ces gangs avec un regard d’anthropologue urbain, ce qui est manifeste lorsqu’il parle du street art qu’il pratique lui-même.
Ce roman coup de poing extrêmement réussi et très habilement construit se lit d’une traite et vous tient en haleine jusqu’au bout. C’est une des grosses claques de cette rentrée.
Six jours, Ryan Gattis, Fayard, 2015

samedi 26 septembre 2015

Old Filth

Sir Edward Feathers a pris sa retraite avec son épouse Betty dans le Dorset. Homme de loi, célèbre dans sa profession sous le nom de Filth, il a connu un destin exceptionnel de la Malaisie à l’Angleterre en passant par Hong Kong. Enfant du Raj, l’Empire britannique, il fut envoyé au pays pour y être éduqué comme un gentleman.
Alternant entre présent et passé, Jane Gardam, dessine le portrait d’un homme complexe qui a appris à dissimuler ses faiblesses. Un délicieux parfum suranné et so british se dégage de ce texte très réussi, qui dévoile certains secrets mais ne révèle pas tout. Tous les mystères qui entourent son couple avec Betty et sa vie à Hong Kong ne sont pas levés.
Ce roman peut se lire indépendamment, mais si comme moi, vous vous êtes attachés à ce bon vieux Filth vous serez ravis d’apprendre que deux autres romans poursuivent et clôturent ses aventures à paraître en 2016. 
Le maître des apparences, Jane Gardam, J.C Lattès, 2015

jeudi 1 janvier 2015

Shotgun Lovesongs

Quatre amis d'enfance se retrouvent à Little Wing pour le mariage de l'un d'entre eux. Contrairement aux autres, Hank est toujours resté là. Il a repris la ferme de son père et s'est marié avec Beth avec laquelle il a eu deux beaux enfants. Lee, quant à lui, est devenu une rock star célèbre. Entre les tournées et les enregistrements de ses albums, il vient se ressourcer auprès de ces amis et sur cette terre qu'il chérit. Ronny a eu aussi son heure de gloire lorsqu'il était champion de rodéo. Après un accident cérébral, il fait l'objet de toute l'attention de ses copains. Kip, lui, était un courtier en banque. De l'argent, il savait en ramasser à la pelle pourtant il fait le pari de revenir, de redynamiser l'économie locale et de rénover le vieux complexe de la fabrique.
Tour à tour, les quatre amis et Beth, la femme de Hank, prennent la parole, se remémorant leurs vieux souvenirs et racontant aussi leur présent. Ce système narratif permet d'éclairer les relations des personnages entre eux, de mieux comprendre leurs désirs, leurs interrogations. Quatre amis, quatre mariages ponctuent cette histoire attachante. A travers eux, Nickolas Butler décortique le sentiment d'appartenance ainsi que les liens puissants qui se tissent durant l'enfance. Cette amitié, si facile à donner enfant, nécessite des efforts et des attentions constantes lorsque l'on devient adulte. Le ton est juste, on s'attache à cette bande de copains qu'on n'a pas envie de quitter. En arrière-plan, Nickolas Butler signe un portrait poétique et nostalgique du Wisconsin, à l'instar des écrivains américains des grands espaces. Il décrit la beauté de la nature et de sa faune, ces hommes qui cultivent une terre en s'appauvrissant et en s'isolant de plus en plus, leurs villes devenant des villes fantômes.
Voici une belle surprise de cette rentrée littéraire que je découvre avec un peu de retard et qui inaugure une nouvelle année pleine de découverte.  
Retour à Little Wing, Nickolas Butler, Autrement, 2014

Je remercie PriceMinister de m'avoir envoyé ce roman dans le cadre des Matchs de la Rentrée littéraire 2014. Très enthousiaste, je lui attribue un 18/20.