mardi 9 avril 2013

Kibboutz

Le kibboutz Yikhat est une petite communauté où tout se sait. Les couples se font et se défont malgré la morale et le qu'en dira-t-on. Certains membres ont plus de retenue et préfèrent taire leurs sentiments plutôt que de les exprimer car dans cette communauté régie par des idéaux marxistes,les tâches sont partagées et où les décisions sont prises ensemble, on est au final bien seul.
Ces petites histoires sont bien cruelles. Les aspirations des uns sont parfois en butte aux règles du kibboutz, les espoirs des autres bafoués par un proche ou leur propre femme. Rien n'est simple dans cette société conçue pour vivre en autarcie, le souhait d'un individu ne correspondant pas aux choix du groupe est systématiquement repoussé. Cette société qui veut s'ériger en modèle se heurte à ses propres idéaux. Ce n'est pas par hasard que la dernière nouvelle traite de l'espéranto. Ce rêve d'une langue unique, qui n'a pu rassembler les peuples comme au temps de Babel, marque symboliquement la crise des valeurs du kibboutz.
Amos Oz entremêle avec un art consommé les destinées de quelques personnages : les personnages principaux des nouvelles deviennent des personnages secondaires dans les autres et font le lien entre tous les textes. Avec une économie de moyens, il fait de très beaux portraits montrant la nature humaine dans ce qu'elle a de plus mesquin ou de plus émouvant. A l'aube de sa vie, son regard est sans concession. J'avais découvert Amos Oz, il y a quelques années, et je suis toujours admirative de son travail.
Entre amis, Amos Oz, Gallimard, 2013