dimanche 30 juin 2013

Il faut parfois savoir se révolter

Méto vit dans un lieu que l'on nomme la Maison. Sa vie, ainsi que celle des 63 garçons, est réglée par les leçons et les activités sportives. Il ne connaît rien du monde extérieur et doit obéir aux règles étranges qui régissent la Maison. On lui confie l'initiation du petit Crassus qui remplace un des grands qui a disparu. A leur arrivée, les enfants ne savent plus rien de leur passé ; leur départ est tout aussi étrange et vers quel destin ?
Méto est un garçon qui tient tête aux Césars détenteurs du pouvoir en ces lieux. Ils font pression sur le groupe et le manipule par la peur. Afin de réduire toute tentative de révolte, des mouchards sont choisis et trahissent leurs camarades. Peur et délation telles sont les mécanismes sur lesquels sont fondés cette communauté.
Méto avec l'aide d'autres élèves et d'anciens devenus des esclaves ou des soldats, va fomenter une révolte. Grâce à eux, il découvre que les enfants ont leur mémoire systématiquement effacées et que ceux qui sont devenus trop âgés deviennent des esclaves, des soldats que l'on modifie génétiquement ou des futurs dirigeants maîtres dans l'art de la manipulation.

Cette révolte menée avec détermination par les enfants les plus âgés ne conduit pas à la liberté mais à la reproduction du schéma qu'ils ont subi et qu'ils font subir du coup à leurs autres camarades. Les forces extérieures se rassemblent pour prendre d'assaut la Maison. Méto et ses amis sont blessés pour certains et capturés par les Oreilles coupées, dernier groupe de cette étrange hiérarchie.
La Maison se trouve sur une île appelée Hélios, qui se situe quelque part au sud de la France. Les Oreilles coupées sont des esclaves qui se sont enfuis et se sont regroupés dans les cavernes de l'île. Ils ont tranché le lobe de leur oreille portant l'anneau, symbole de leur condition. Ils pourraient être annihilés par les soldats mais on les laisse survivre pour les utiliser comme cible pour s'entraîner (et vice versa d'ailleurs).
Méto et ses amis sont très mal accueillis par cette communauté où la loi du plus fort prévaut. Là encore, le système de clans est basé sur la violence et la peur. Après de nombreuses découvertes et suite à des trahisons, Méto rejoint le groupe E qui est l'élite des enfants formés sur l'île. Son entraînement et son instruction nous révèle enfin les clefs de ce monde. Je ne vous en dirai pas plus pour vous laisser découvrir la suite...

Dans cette dystopie passionnante, à l'univers glauque et angoissant, la quête de la liberté et de la démocratie ne se fait pas sans heurts. Yves Grevet signe trois excellents livres qui donnent à réfléchir sur la notion de désobéissance civile et le refus de la dictature. Ses romans sont d'autant plus inquiétants qu'il montre avec beaucoup de finesse les ressorts psychologiques liés aux conditionnements. Changer l'ordre établi et proposer un mode de vie démocratique ne vont pas de soi pour ceux qui ne l'ont jamais connue. Très honnêtement, cette série est une des mes meilleures découvertes de cette année et dès que j'en aurais l'occasion, je l'irai les deux tomes de Nox du même auteur.
Méto, tomes 1 à 3, Yves Grevet, Syros, 2008-2010

mardi 18 juin 2013

Macaron citron


Colline, le jour de ses 16 ans, avoue par mail à son père qu'elle est amoureuse de Sara. Elle raconte sa rencontre avec elle et son coup de foudre. Ce qu'elle savait au plus profond d'elle-même se révèle au grand jour, elle aime les femmes. Sa mère, son frère et sa grand-mère l'accepte comme elle est mais c'est plus difficile pour son père. Elle est amoureuse, elle a grandi et lui reste un homme "pas cool" comme dit sa mère ; il lui faudra du temps pour l'accepter.
Au lycée, Ludo, son ami d'enfance et amoureux transi, ne supporte pas non plus ce qu'elle lui dit tandis qu'Elsa, rassurée de ne pas avoir été lâchée pour un autre amie, lui ouvre les bras et le coeur. Sara, quant à elle, reste discrète. Elle n'a pas un entourage aussi compréhensif et ne propose des rendez-vous que loin du lycée et de sa famille aussi.
L'entourage prend plus ou moins bien la révélation de l'homosexualité d'un proche. Pour Colline, somme toute, tout se passe bien me direz-vous. Tout n'est pas aussi rose dans la vie mais ce roman vaut aussi pour cette belle déclaration d'amour qui m'a rappelée la lecture de cette belle bande dessinée qu'est Le bleu est une couleur chaude.
Macaron citron, Claire Mazard, Syros, 2003

jeudi 13 juin 2013

Aimer manger, une malédiction ?


Susy Morgenstern s'est battue toute sa vie contre son poids et son irrépressible envie de manger. Elle passe en revue son enfance, son comportement alimentaire similaire à celui de ses soeurs qui organisaient des descentes dans le frigo ou les salons de thé. Elle évoque les multiples régimes auxquels elle s'est astreinte et cette honte qui l'assaille chaque fois qu'elle succombe. Elle ne connaît pas la faim mais elle est gourmande et a un appétit irrépressible pour la vie.                   Ce texte très touchant fait partie d'une collection où de grands auteurs jeunesse parlent de leurs problèmes à l'adolescence. Susy Morgenstern explique ses tiraillements intérieurs qui aujourd'hui encore ne sont pas résolus. Cette obsession du poids est également à l'origine de sa vocation d'écrivain puisque son premier texte s'appelle La grosse patate. Pas facile d'être gros dans un monde où la minceur est érigée en canon de beauté. On pense toujours que quelqu'un de gros n'a pas de volonté mais la nourriture est une addiction comme une autre et tout aussi dangereuse.Confession d'une grosse patate, Susy Morgenstern, La Martinière 2003



samedi 8 juin 2013

Cinq et non pas quatre


Les soeurs Verdelaine ne sont pas 4 mais bien 5. Enid, 9 ans, qui affectionne les animaux et possède un monde imaginaire à elle ; Hortense, 11 ans, qui a toujours un livre à la main ; Bettina, 14 ans, l'empêcheuse de tourner en rond, accro à la mode et aux garçons ; Geneviève, 16 ans, qui sous des dehors paisible s'adonne à la boxe thaïe. Tout ce petit monde a sa vie orchestrée par Charlie, 23 ans, contrainte d'abandonner ses études pour travailler et faire vivre sa fratrie. Les soeurs Verdelaine ont perdu leurs parents dans un accident de voiture et vivent seules dans la maison familiale, la Vill'Hervé, au bord de la falaise.L'humour, le plaisir des mots, les joutes verbales sont un bonheur constant. Chaque tome porte sur une des soeurs et reflète bien les préoccupation de son âge. De la quête aventureuse d'Enid qui découvre le secret de la vieille maison, en passant par l'amitié, les premières amours. Malgré leurs mésententes, les soeurs sont très soudées et la famille fait front devant l'adversité. Toutes voient et parlent aux fantômes de leurs parents défunts sans jamais se l'avouer. Ce n'est que lorsqu'elles sont prêtes à tourner une nouvelle page de leur vie que leurs parents prennent congé.
Ces romans ne sont pas sans me rappeler les Quatre filles du docteur March ou certains livres de la collection rose. Il y a un petit parfum rétro qui m'a beaucoup plu et m'a fait replonger dans mes souvenirs de lecture, enfant. Au final, un très bon moment de lecture avec des personnages haut en couleur et attachants.
Quatre soeurs, Malika Ferdjoukh, Ecole des Loisirs, 2010