mercredi 20 juillet 2011

Insoutenable solitude

Nestor est pris au piège par une cathédrale de chair, la sienne, qui est aussi le symbole de son désespoir et de sa solitude. Immigré argentin fuyant la dictature, il retrouve à Paris une jeune femme qu'il avait rencontré autrefois et qu'il épouse. La vie reprend plus douce mais elle finit par le meurtrir à nouveau. Nestor ne fait plus rien si ce n'est manger et rendre visite tous les jours à sa femme plongée dans le coma. Il ne parle pas pourtant sa constance finit pas intriguer Alice un médecin de l'hôpital.
Plus proche de la grande nouvelle que du roman, le récit se termine par trois fins alternatives qui offrent une réponse différente à la lecture du texte. Je trouve l'idée intéressante comme j'ai apprécié l'écriture ciselée de l'écrivain. Je reste un peu frustrée car j'aurais aimé que le texte soit plus développé. Les deux personnages principaux sont intéressants mais ils auraient mérité d'être plus exploités car la relation qui naît entre eux apparaît par trop factice et improbable.
Nestor rend les armes, Clara Dupont-Monod, S. Wespieser, 2011 

mercredi 13 juillet 2011

Dis, Maman, c'est quoi le monde ?

Jack est sur le point de fêter ses cinq ans. C'est un petit garçon  qui a les préoccupations de son âge : il se passionne pour les aventures de Dora l'exploratrice et tout ce qui peut être diffusé par Madame Télé. Hormis sa maman, qui occupe une grande place dans sa vie et tout ce qui constitue la Chambre, Jack ne connaît rien du monde extérieur car il est né en captivité. Sa maman prend conscience que l'enfant grandit et que, l'illusion de mener une vie normale qu'elle a entretenue pour Jack, s'effrite devant ses questions incessantes. Il est temps pour eux de se sauver et de retrouver le monde extérieur. 
La narration est assurée par Jack qui évoque ce qu'il connaît soit une chambre de quinze mètres carrés et tout ce qu'elle contient. Le fait que cette tragédie soit exprimée par des mots d'enfant permet de ne pas prendre toute l'horreur de la situation de plein fouet. Jack relate des événements qui entrent dans son système de compréhension du monde. Seuls sa maman et le lecteur mesurent le décalage entre ce qui devrait être mais qui ne l'est pas. La fuite et la (re)découverte du monde extérieur va bouleverser les échelles de valeur de Jack et causer un électrochoc à sa maman. Ensemble, ils vont lutter pour (ré)apprendre à vivre. 
Room, Emma Donoghue, Stock, 2011

samedi 9 juillet 2011

De l'anatomie de l'oursin et autres considérations littéraires


Le narrateur rencontre Azélie lors d'un dîner à Paris. Cette dernière lui propose de venir s'installer dans son château afin de rédiger le catalogue de la somptueuse bibliothèque de la famille. Suivent trois années de souvenirs, de portraits et de petits événements qui viennent pimenter la vie tranquille du narrateur jusqu'à la révélation d'un terrible secret.
L'intrigue se trouve ainsi résumée en quelques lignes car l'intérêt de ce livre ne repose que sur son écriture et les propos du narrateur. Thierry Laget rend hommage à ses maîtres que sont Balzac, Stendhal et Proust. Ce dernier a une influence considérable sur la prose de l'auteur lui donnant un charme suranné entaché d'un brin de pédanterie. Cette écriture introduit un décalage amusant lorsque le narrateur aborde des sujets prosaïques ou directement liés à notre société contemporaine comme un passage en centre commercial. L'ironie sous-jacente donne quelques passages assez bien troussés, je demeure néanmoins sceptique sur certains propos tenus par le narrateur portant aux nues une littérature exigeante. Fort bien, mais en ce cas, une belle écriture, des références culturelles ne suffisent pas à pallier l'absence de profondeur de l'ensemble.
La lanterne d'Aristote, Thierry Laget, Gallimard, 2011 (lu sur épreuves)

samedi 2 juillet 2011

Tragédie grecque en terres australes

Jack Fitzgerald est entré dans la police après la disparition mystérieuse de sa femme et de sa fille sur l'île du Sud en Nouvelle-Zélande. Vingt-cinq ans plus tard, il est devenu un des meilleurs flics d'Auckland mais son désespoir et sa colère ne se sont pas pour autant éteints. Une jeune femme est retrouvée morte sur la plage mutilée. Les conditions de sa mort sont identiques à une affaire ancienne sur laquelle a travaillé la criminologue Ann Waitura, qui accompagne Fitzgerald dans son enquête.
L'intrigue repose sur Jack Fitzgerald, un personnage éminemment charismatique et torturé. Hanté par la disparition de sa femme et de sa fille, il est désespéré, violent et dépasse sans cesse les limites. Il y a un véritable souffle dans ce roman qui est d'une rare noirceur et se termine par une véritable hécatombe. Je suis restée un peu sonnée à la fin de ma lecture. Ce livre m'a laissé une forte impression tant sa mécanique est implacable.
Haka, Caryl Férey, Folio, 2003