samedi 25 février 2012

La solitude du chasseur

Le narrateur fait paraître un poème dans une revue de chasse sur la solitude du chasseur. Quelques temps plus tard, il reçoit une lettre d'un certain Misugi qui a vu dans ce texte sa propre histoire. Afin de mieux se faire comprendre du narrateur, il joint à la sienne trois lettres. Ce sont les lettres de Shoko, la fille de sa maîtresse, celle de Midori, sa femme légitime, et celle de Saiko, sa maîtresse écrite peu avant sa mort. Trois lettres, trois points de vue qui éclairent une histoire dramatique.
Chaque femme choisit de raconter des événements qui l'ont marqué ou blessé. Toutes expriment leur douleur et leur colère d'être trahie ou de se sentir coupable. Inoue fait preuve d'une grande finesse dans l'analyse des sentiments et des ressorts psychologiques. Il utilise habilement les objets comme symboles et catalyseurs du ressenti des personnages. Le fusil signifie la solitude ainsi que la pulsion de meurtre chez Misugi tandis que le aori en soie gris mauve orné de chardons est le signe de l'adultère. Il cristallise d'ailleurs des émotions contradictoires puisqu'il est une marque d'amour pour Saiko, un signe de jeunesse pour Soko et la preuve de la trahison pour Midori.
La sobriété de son écriture et l'économie de moyens d'Inoue font que les remarques les plus anodines deviennent terribles. Le lecteur au cours de sa lecture reconstituent les blancs, lit entre les lignes et se fait peu à peu une idée précise de l'ampleur de la tragédie. Ce livre singulier et cruel où chaque protagoniste porte un poids en son coeur est une véritable réussite.
Le fusil de chasse, Inoue Yasushi, LGF, 2008